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18 mai 2018

Expanding the fortress

La politique d’#externalisation_des_frontières de l’UE, ses bénéficiaires et ses conséquences pour les #droits_humains.

A voir sur sentis.net







Résumé du rapport
La situation désespérée des 66 millions de personnes déplacées dans le monde ne semble troubler la conscience européenne que lorsqu’un drame a lieu à ses frontières et se retrouve sous le feu des projecteurs médiatiques. Un seul État européen – l’Allemagne – se place dans les dix premiers pays au monde en termes d’accueil des réfugiés : la grande majorité des personnes contraintes de migrer est accueillie par des États se classant parmi les plus pauvres au monde. Les migrations ne deviennent visibles aux yeux de l’Union européenne (UE) que lorsque les médias s’intéressent aux communautés frontalières de Calais, Lampedusa ou Lesbos et exposent le sort de personnes désespérées, fuyant la violence et qui finissent par mourir, être mises en détention ou se retrouver bloquées.
Ces tragédies ne sont pas seulement une conséquence malheureuse des conflits et des guerres en cours dans différents endroits du monde. Elles sont aussi le résultat des politiques migratoires européennes mises en œuvre depuis les accords de Schengen de 1985. Ces politiques se sont concentrées sur le renforcement des frontières, le développement de méthodes sophistiquées de surveillance et de traque des personnes, ainsi que l’augmentation des déportations, tout en réduisant les possibilités de résidence légale malgré des besoins accrus. Cette approche a conduit un grand nombre de personnes fuyant la violence et les conflits et incapables d’entrer en Europe de manière légale à emprunter des routes toujours plus dangereuses.
Ce qui est moins connu, c’est que les tragédies causées par cette politique européenne se jouent également bien au-delà de nos frontières, dans des pays aussi éloignés que le Sénégal ou l’Azerbaïdjan. Il s’agit d’un autre pilier de la gestion européenne des flux migratoires : l’externalisation des frontières. Depuis 1992, et plus encore depuis 2005, l’UE a mis en œuvre des politiques visant à externaliser les frontières du continent et empêcher les populations déplacées de parvenir à ses portes. Cela implique la conclusion d’accords avec les pays voisins de l’UE afin qu’ils reprennent les réfugiés déportés et adoptent, comme l’Europe, des mesures de contrôle des frontières, de surveillance accrue des personnes et de renforcement de leurs frontières. En d’autres termes, ces accords ont fait des pays voisins de l’UE ses nouveaux garde-frontières. Et parce qu’ils sont loin des frontières européennes et de l’attention médiatique, les impacts de ces politiques restent relativement invisibles aux yeux des citoyens européens.
Ce rapport cherche à mettre en lumière les politiques qui fondent l’externalisation des frontières européennes et les accords conclus, mais aussi les multinationales et sociétés privées qui en bénéficient, et les conséquences pour les personnes déplacées ainsi que pour les pays et les populations qui les accueillent. Il est le troisième de la série Border Wars, qui vise à examiner les politiques frontalières européennes et à montrer comment les industries des secteurs de l’armement et de la sécurité ont contribué à façonner les politiques de sécurisation des frontières de l’Europe, puis en ont tiré les bénéfices en obtenant un nombre croissant de contrats dans le secteur.
Ce rapport étudie l’augmentation significative du nombre de mesures et d’accords d’externalisation des frontières depuis 2005, le phénomène s’accélérant massivement depuis le sommet Europe-Afrique de La Valette en novembre 2015. Via une série de nouveaux instruments, tels que le Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique (EUTF), le Cadre pour les partenariats avec les pays tiers en matière de gestion des migrations et la Facilité en faveur des réfugiés en Turquie, l’UE et les États membres injectent des millions d’euros dans un ensemble de projets visant à prévenir la migration de certaines populations vers le territoire européen.
Cela implique la collaboration avec des pays tiers en matière d’accueil des personnes déportées, de formation des forces de police et des garde-frontières ou le développement de systèmes biométriques complets, ainsi que des donations d’équipements incluant hélicoptères, bateaux et véhicules, mais aussi des équipements de surveillance et de contrôle. Si de nombreux projets sont coordonnés par la Commission européenne, un certain nombre d’États membres, tels que l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne, prennent également des initiatives individuelles plus poussées en finançant et en soutenant les efforts d’externalisation des frontières par le biais d’accords bilatéraux.
Ce qui rend cette collaboration particulièrement problématique est le fait que de nombreux gouvernements qui en bénéficient sont profondément autoritaires, et que les financements sont souvent destinés aux organes de l’État les plus responsables des actes de répression et de violations des droits humains. L’UE fait valoir, à travers l’ensemble de ses politiques, une rhétorique consensuelle autour de l’importance des droits humains, de la démocratie et de l’état de droit ; il semble cependant qu’aucune limite ne soit posée lorsque l’Europe soutient des régimes dictatoriaux pour que ces derniers s’engagent à empêcher « l’immigration irrégulière » vers le sol européen. Le résultat concret se traduit par des accords et des financements conclus entre l’UE et des régimes aussi tristement célèbres que ceux du Tchad, du Niger, de Biélorussie, de Libye ou du Soudan.
Les politiques européennes dans ce domaine ont des conséquences considérables pour les personnes déplacées, que le statut « illégal » rend déjà vulnérables et plus susceptibles de subir des violations de droits humains. Nombre d’entre elles finissent exploitées, avec des conditions de travail inacceptables, ou encore sont mises en détention ou directement déportées dans le pays qu’elles ont fui. Les femmes réfugiées sont particulièrement menacées par les violences basées sur le genre, les agressions et l’exploitation sexuelles.
La violence et la répression que subissent les déplacés favorisent également l’immigration clandestine, reconfigurant les activités des passeurs et renforçant le pouvoir des réseaux criminels. De fait, les personnes déplacées sont souvent forcées de se lancer sur des routes alternatives, plus dangereuses, et de s’en remettre à des trafiquants de moins en moins scrupuleux. En conséquence, le nombre de morts sur les routes migratoires s’élève de jour en jour.
En outre, le renforcement des organes de sécurité de l’Etat dans l’ensemble des pays du MENA (Moyen Orient Afrique du Nord), du Maghreb, du Sahel et de la Corne de l’Afrique constitue une menace directe contre les droits humains et la responsabilité démocratique dans ces zones, notamment en détournant des ressources essentielles qui pourraient suppress être destinées à des mesures économiques ou sociales. En effet, ce rapport montre que l’obsession européenne à prévenir les flux migratoires réduit non seulement les ressources disponibles, mais dénature également les échanges, l’aide et les relations internationales entre l’Europe et ces régions. Comme l’ont signalé de nombreux experts, ce phénomène crée un terreau favorable à toujours plus d’instabilité et d’insécurité, et a pour conséquence de pousser toujours plus de personnes à prendre la route de l’exil.
Un secteur économique a cependant grandement tiré parti des programmes d’externalisation des frontières de l’UE. En effet, comme l’ont montré les premiers rapports Border Wars, les secteurs de l’industrie militaire et de sécurité ont été les principaux bénéficiaires des contrats de fourniture d’équipements et de services pour la sécurité frontalière. Les entreprises de ces secteurs travaillent en partenariat avec un certain nombre d’institutions intergouvernementales et (semi) publiques qui ont connu une croissance significative ces dernières années, à mesure qu’étaient mise en oeuvre des dizaines de projets portant sur la sécurité et le contrôle des frontières dans des pays tiers.
Le rapport révèle que :
La grande majorité des 35 pays considérés comme prioritaires par l’UE pour l’externalisation de ses frontières sont gouvernés par des régimes autoritaires, connus pour leurs violation des droits humains et avec des indicateurs de développement humain faibles.
48% d’entre eux (17) ont un gouvernement autoritaire, et seulement quatre d’entre eux sont considérés comme démocratiques (mais toujours imparfaits)
448% d’entre eux (17) sont listés comme « non-libres », et seulement trois sont listés comme « libres » ; 34% d’entre eux (12) présentent des risques extrêmes en matière de droits humains et les 23 autres présentent des risques élevés.
51% d’entre eux (18) sont caractérisés par un « faible développement humain », seulement huit ont un haut niveau de développement humain.
Plus de 70% d’entre eux (25) se situent dans le dernier tiers des pays du monde en termes de bien-être des femmes (inclusion, justice et sécurité)
Les États européens continuent à vendre des armes à ces pays, et cela en dépit du fait que ces ventes alimentent les conflits, les actes de violence et de répression, et de ce fait contribuent à l’augmentation du nombre de réfugiés. La valeur totale des licences d’exportations d’armes délivrées par les États membres de l’UE à ces 35 pays sur la décennie 2007-2016 dépasse les 122 milliards d’euros. Parmi eux, 20% (7) sont sous le joug d’un embargo sur les ventes d’armes demandé par l’UE et/ou les Nations Unies, mais la plupart reçoivent toujours des armes de certains États membres, ainsi qu’un soutien à leurs forces armées et de sécurité dans le cadre des efforts liés aux politiques migratoires.
Les dépenses de l’UE en matière de sécurité des frontières dans les pays tiers ont considérablement augmenté. Bien qu’il soit difficile de trouver des chiffres globaux, il existe de plus en plus d’instruments de financement pour les projets liés aux migrations, la sécurité et les migrations provient de plus en plus d’instruments, la sécurité et les migrations irrégulières étant les principales priorités. Ces fonds proviennent aussi de l’aide au développement. Plus de 80% du budget de l’EUTF vient du Fonds européen de développement et d’autres fonds d’aide au développement et d’aide humanitaire.
L’augmentation des dépenses en matière de sécurité des frontières a bénéficié à un large éventail d’entreprises, en particulier des fabricants d’armes et des sociétés de sécurité biométrique. Le géant de l’armement français Thales, qui est également un exportateur incontournable d’armes dans la région, est par exemple un fournisseur reconnu de matériel militaire et de sécurité pour la sécurisation des frontières et de systèmes et équipements biométriques. D’autres fournisseurs importants de systèmes biométriques incluent Véridos, OT Morpho et Gemalto (qui sera bientôt racheté par Thales). L’Allemagne et l’Italie financent également leurs propres groupes d’armement – Hensoldt, Airbus et Rheinmetall pour l’Allemagne et Leonardo et Intermarine pour l’Italie – afin de soutenir des programmes de sécurisation des frontières dans un certain nombre de pays du MENA, en particulier l’Égypte, la Tunisie et la Libye. En Turquie, d’importants contrats de sécurisation des frontières ont été remportés par les groupes de défense turcs, notamment Aselsan et Otokar, qui utilisent les ressources pour subventionner leurs propres efforts de défense, également à l’origine des attaques controversées de la Turquie contre les communautés kurdes.
Un certain nombre d’entreprises semi-publiques et d’organisations internationales ont également conclu des contrats de conseil, de formation et de gestion de projets en matière de sécurité des frontières. On y trouve la société para-gouvernementale française Civipol, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et le Centre international pour le développement des politiques migratoires (ICMPD). Les groupes Thales, Airbus et Safran sont présents au capital de Civipol, qui a rédigé en 2003, à titre de consultant pour la Commission Européenne, un document très influent établissant les fondations pour les mesures actuelles d’externalisation des frontières, dont elle bénéficie aujourd’hui.
Les financements et les dons en matière d’équipements militaires et de sécurité ainsi que la pression accrue sur les pays tiers pour qu’ils renforcent leurs capacités de sécurité aux frontières ont fait croître le marché de la sécurité en Afrique. Le groupe de lobbying Association européenne des industries aérospatiales et défense (ASD) a récemment concentré ses efforts sur l’externalisation des frontières de l’UE. De grands groupes d’armement tels qu’Airbus et Thales lorgnent également sur les marchés africains et du Moyen-Orient, en croissance.
Les décisions et la mise en œuvre de l’externalisation des frontières au niveau de l’Union européenne ont été caractérisées par une rapidité d’exécution inhabituelle, hors du contrôle démocratique exercé par le Parlement européen. De nombreux accords importants avec des pays tiers, parmi lesquels les pactes « Migration Compact » signés dans le Cadre pour les partenariats et l’Accord UE- Turquie, ont été conclus sans ou à l’écart de tout contrôle parlementaire.
Le renforcement et la militarisation de la sécurité des frontières ont conduit à une augmentation du nombre de morts parmi les personnes déplacées. En général, les mesures visant à bloquer une route particulière de migration poussent les personnes vers des routes plus dangereuses. En 2017, on a dénombré 1 mort pour 57 migrants traversant la Méditerranée ; en 2015, ce chiffre était de 1 pour 267. Cette statistique reflète le fait qu’en 2017, les personnes déplacées (pourtant moins nombreuses qu’en 2015), principalement originaires d’Afrique de l’Ouest et de pays subsahariens, ont préféré la route plus longue et plus dangereuse de la Méditerranée Centrale plutôt que la route entre la Turquie et la Grèce empruntée en 2015 par des migrants (principalement Syriens). On estime que le nombre de migrants morts dans le désert est au moins le double de ceux qui ont péri en Méditerranée, bien qu’aucun chiffre officiel ne soit conservé ou disponible.
On assiste à une augmentation des forces militaires et de sécurité européennes dans les pays tiers pour la sécurité aux frontières. L’arrêt des flux migratoires est devenu une priorité des missions de Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) au Mali et au Niger, tandis que des États membres tels que la France ou l’Italie ont également décidé de déployer des troupes au Niger ou en Libye.
Frontex, l’Agence européenne de garde-frontières et garde-côtes, collabore de plus en plus avec les pays tiers. Elle a entamé des négociations avec des pays voisins de l’UE pour mener des opérations conjointes sur leurs territoires. La coopération en matière de déportation est déjà largement implantée. De 2010 à 2016, Frontex a coordonné 400 vols de retours conjoints avec des pays tiers, dont 153 en 2016. Depuis 2014, certains de ces vols ont été appelés « opérations de retour conjoint », l’avion et les escortes navigantes provenant des pays de destination. Les États membres invitent de plus en plus fréquemment des délégations de pays tiers à identifier les personnes « déportables » sur la base de l’évaluation de nationalité. Dans plusieurs cas, ces identifications ont conduit à l’arrestation et à la torture des personnes déportées.
Ce rapport examine ces impacts en cherchant à établir comment ces politiques ont été mises en œuvre en Turquie, en Libye, en Égypte, au Soudan, au Niger, en Mauritanie et au Mali. Dans tous ces pays, pour parvenir à la conclusion de ces accords, l’UE a dû fermer les yeux ou limiter ses critiques sur les violations des droits humains.
En Turquie, l’UE a adopté un modèle proche de celui de l’Australie, externalisant l’ensemble du traitement des personnes déplacées en dehors de ses frontières, et manquant ainsi à des obligations fondamentales établies par le droit international, telles que le principe de non-refoulement, le principe de non-discrimination (l’accord concerne exclusivement les populations syriennes) et le principe d’accès à l’asile.
En Libye, la guerre civile et l’instabilité du pays n’ont pas empêché l’UE ni certains de ses États membres, comme l’Italie, de verser des fonds destinés aux équipements et aux systèmes de gestion des frontières, à la formation des garde-côtes et au financement des centres de détention – et ce bien qu’il ait été rapporté que des garde-côtes avaient ouvert le feu sur des bateaux de migrants ou que des centres de détentions étaient gérés par des milices comme des camps de prisonniers.
En Égypte, la coopération frontalière avec le gouvernement allemand s’est intensifiée malgré la croissante consolidation du pouvoir militaire dans le pays. L’Allemagne finance les équipements et la formation régulière de la police aux frontières égyptienne. Les personnes déplacées se trouvent régulièrement piégées dans le pays, dans l’impossibilité de se rendre en Libye du fait de l’insécurité qui y règne, et subissent les tirs des gardes-côtes égyptiens s’ils décident de prendre la route maritime.
Au Soudan, le soutien à la gestion des frontières fourni par l’UE n’a pas seulement conduit à suppress sortir un régime dictatorial de son isolement sur la scène internationale, mais a également renforcé les Forces de soutien rapide, constituées de combattants de la milice Janjawid, considérée comme responsables de violations de droits humains au Darfour.
La situation au Niger, un des pays les plus pauvres au monde, montre bien le coût de la politique de contrôle des migrations subi par les économies locales. La répression en cours à Agadez a considérablement affaibli l’économie locale et poussé la migration dans la clandestinité, rendant la route plus dangereuse pour les migrants et renforçant le pouvoir des gangs de passeurs armés. De même au Mali, l’imposition des mesures d’externalisation des frontières par l’UE dans un pays tout juste sorti d’une guerre civile menace de raviver les tensions et de réveiller le conflit.
L’ensemble des cas étudiés met en lumière une politique de l’UE via-à-vis de ses voisins obsessionnellement focalisée sur les contrôles migratoires, quel que soit le coût pour les pays concernés ou les populations déplacées. C’est une vision étroite et finalement vouée à l’échec de la sécurité, car elle ne s’attaque pas aux causes profondes qui poussent les gens à migrer : les conflits, la violence, le sous-développement économique et l’incapacité des États à gérer correctement ces situations. Au lieu de cela, en renforçant les forces militaires et de sécurité dans la région, ces politiques prennent le risque d’exacerber la répression, de limiter la responsabilité démocratique et d’attiser des conflits qui pousseront plus de personnes à quitter leurs pays. Il est temps de changer de cap. Plutôt que d’externaliser les frontières et les murs, nous devrions externaliser la vraie solidarité et le respect des droits de l’homme.

Par CDB_77
géographe & citoyenne engagée

08 mai 2018

Le Parisien : Sauvetage de migrants : tensions entre gardes-côtes et ONG au large de la Libye

Plusieurs associations dénoncent le traitement infligé aux migrants par les garde-côtes libyens. Ces derniers travaillent en coordination avec l’Italie.


Toujours pas d’apaisement en Méditerranée entre ONG et gardes-côtes libyens. Ce week-end, plusieurs navires humanitaires souhaitant s’approcher d’embarcations de migrants en détresse se sont vus refuser l’accès.
« Les Libyens agissent comme des pirates dans les eaux internationales, exigeant que leur soit reconnue une autorité. Ils agissent hors du droit et ils le font avec des moyens fournis par le gouvernement italien », a accusé sur Twitter le député italien de gauche Riccadro Magi. Samedi, il était à bord de l’Astral, un voilier appartenant à l’ONG Proactiva Open Arms, lorsqu’une vedette libyenne a ordonné au navire de s’éloigner.

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Les Jours : Les noyés du désert

Les routes de la migration tuent, bien avant la Méditerranée. Au Niger, le Sahara est un cimetière de corps anonymes.

C’est un classeur d’écolier, avec l’ancien footballeur français Youri Djorkaeff en couverture. À l’intérieur, une douzaine de feuilles A4 ont été glissées dans des pochettes plastique. Sur chacune d’entre elles, six visages de jeunes hommes, parfois floues à force d’avoir été scannées, agrandies, imprimées. À côté, une indication de la route prise depuis Gandiole ou Thiaroye, deux petits villages de pêcheurs au Sénégal. « Départ en Espagne via la Mauritanie », « Départ en Espagne via le Maroc »… Tous ont disparu en chemin. Les messages ressemblent à des bouteilles jetées dans le désert : nous sommes à Agadez, au Niger, à plus de 3 000 km de la côte atlantique, que ces jeunes hommes ont peut-être longée pour se rendre jusqu’à Gibraltar ou rejoindre Ceuta et Melilla, enclaves espagnoles au Maroc. Ont-ils péri en Méditerranée, comme PM390047, le propriétaire du téléphone portable jaune qui attend à la morgue de Milan ? Leurs familles, sans nouvelles depuis des années, ont mis les photos à la disposition du CICR (Comité international de la Croix-Rouge) en 2014, pour qu’elles soient montrées aux étrangers de passage à Agadez, lieu de transit de centaines de milliers de personnes en partance vers l’Europe (lire l’épisode 6, « Au Niger, la frontière invisible de l’Europe »).


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27 avril 2018

Centre Primo Levi : Citoyens solidaires : héros ou criminels ?

Bonjour ,
« Chaque jour, je devais prendre la pire décision qui soit : qui sauver de la noyade ? [...] On essayait de sauver d’abord les enfants. Lorsqu’on les sortait de l’eau glacée, leurs petits pieds étaient les plus froids que j’aie jamais vus. »
Ce sont les mots de Manuel, un pompier espagnol qui sera bientôt jugé pour trafic d’êtres humains. Dans moins d’un mois, il comparaîtra devant les tribunaux grecs pour avoir sauvé des hommes, des femmes et des enfants de la noyade. Chaque jour, de courageux bénévoles partout en Europe risquent la même chose que Manuel. Mais nous avons un plan.
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23 avril 2018

AEDH : D’une présidence à l’autre, la transmission de la « patate chaude » …

Pour la réforme du droit d’asile, rendez-vous en juin 2018 ! C’est, grosso modo, ce que sont dit les chefs d’États et de gouvernement lors du dîner de leur dernière rencontre de l’année, le 14 décembre 2017.
En leur adressant cette invitation, Donald Tusk avait marqué un certain scepticisme quant à la perspective de parvenir à un accord sur des quotas de répartition/relocalisation des demandeurs d’asile entre les États membres, tels que prévus par le projet de réforme du règlement Dublin de la Commission. Ce qui n’avait pas manqué de susciter quelques remous… La conclusion que le président du Conseil européen tire de cette dernière réunion de 2017 donne à penser que les débats sont effectivement loin d’être clos et que la réforme du régime d’asile européen est loin de réunir un consensus : « Ma (…) question portait sur la réforme du règlement de Dublin, notamment sur la question des quotas obligatoires. (…) J’ai reçu une réponse positive quant à la détermination à œuvrer dans un esprit de consensus. Les quotas obligatoires demeurent une question litigieuse, même si les tensions se sont sensiblement apaisées. Ne fût-ce que pour cette raison, il était utile de soulever cette question. Un compromis sera-t-il possible? Il paraît très difficile à trouver. Mais nous devons tout mettre en œuvre pour y parvenir. Nous évaluerons les progrès réalisés à cet égard en mars, les dirigeants souhaitant prendre des décisions en juin ».
Lire : AEDH
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21 avril 2018

Speech by High Representative/Vice-President Federica Mogherini at the European Parliament


Speech by High Representative/Vice-President Federica Mogherini at the European Parliamentplenary session on the Progress on the UN Global Compact for safe, regular and orderly migration and UN Global Compact on refugees.

Strasbourg, 13 March 2018
Check against delivery!
Thank you Mr President.
On the UN Global Compacts on Migration and Refugees, let me start with a good news, a good story for once; a little, big European achievement of the last few months. You might remember, last December I came to Strasbourg and here, in this hemicycle we talked about detention centres in Libya. I took in front of you, and most of all, in front of all those people who are suffering inside these detention centres in Libya, the commitment to bring back to their homes 15.000 migrants from within the detention centres to their countries or origin, in a safe manner with Assisted Voluntary Returns, made with our assistance, through the IOM [International Organisation for Migration].
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17 avril 2018

migreurop : L’Espagne et le Maroc doivent respecter les droits des enfants migrants

Voir : ANAFE
Ces derniers mois, le nombre de personnes migrantes et/ou demandeuses d’asile tentant d’accéder au territoire européen à travers la dénommée « frontière sud » entre le Maroc et l’Espagne, a nettement augmenté. La fermeture d’autres routes (Grèce, Italie), et la non délivrance de visas pour accéder au territoire européen, ont provoqué en 2017, la multiplication par trois du nombre d’arrivées en pateras sur les côtes espagnoles, mais aussi 249 morts par naufrage dans la zone. À ce jour, en 2018, plus de 520 personnes ont perdu la vie en Méditerranée, dont plus de 140 en tentant de rejoindre l’Espagne [1] .
Parmi les exilé-e-s il y a notamment des enfants qui migrent seuls et se retrouvent en situation d’errance à la frontière maroco-espagnole et dans les rues de Ceuta et Melilla, avec des administrations publiques qui se refusent à assumer leurs obligations en matière de protection sociale de l’enfance. Cette situation s’est illustrée de façon tragique la semaine du 2 avril avec la mort de deux mineurs : l’un à Ceuta et l’autre à Beni-Ansar (Maroc, frontière avec Melilla). Dans les deux cas, selon des témoins, ils auraient été intentionnellement renversés par des camions. L’un des conducteurs a depuis été incarcéré à Ceuta.
La militarisation croissante des ports à Ceuta et Melilla (installation de nouveaux murs et barbelés tranchants, matériel de surveillance) pour empêcher la traversée de ces jeunes exilés accentue leur mise en danger. Loin de se décourager, ces enfants prennent davantage de risques pour embarquer sur des ferries à destination de la péninsule espagnole. Entre 2015 et 2017, trois mineurs ont perdu la vie dans le port de Melilla. À Ceuta et Melilla, la violence policière contre les mineurs isolés (majoritairement marocains) est régulièrement documentée, ainsi que des cas de violences à caractère raciste émanant de civils [2]. Côté marocain, à Beni-Ansar et Nador, les jeunes sont pourchassés par la police, arrêtés et éloignés de la frontière [3] .
Migreurop et ses organisations membres alertent sur cette situation des deux côtés de la frontière et rappellent aux deux pays, signataires de la Convention internationale des Droits de l’Enfant, leurs obligations internationales en matière de protection des enfants.
Le réseau dénonce également la recrudescence de la violence des militaires à l’encontre des personnes migrantes dites « subsahariennes » à cette frontière – visant dorénavant aussi les femmes dans les campements côté marocain –, la persistance des « refoulements à chaud » [4] et de l’usage de matériel anti-émeute côté espagnol. Ces pratiques, anciennes et récurrentes, exercées bien souvent en-dehors de tout cadre légal et en violation des conventions internationales, doivent cesser immédiatement. Ces politiques de contrôle des frontières et d’expulsion produisent, chaque année, des violations des droits humains inacceptables et des morts parmi les exilé-e-s, enfants et adultes. Dans ce contexte, l’intimidation de personnes solidaires et défendant les droits des personnes, est inconcevable et doit cesser également.
L’Espagne et le Maroc ne peuvent continuer de bafouer les droits des personnes migrantes au nom de la sécurisation des frontières européennes. Ces États sont responsables, tout comme l’Union européenne et ses États membres, de la mise en danger d’enfants et d’adultes en quête d’exil, ainsi que des morts provoquées par cette gestion militaire des mouvements migratoires.

Notes

[1« APDHA reclama vías seguras tras triplicarse las entradas por mar el pasado año », 26 février 2018 : https://www.apdha.org/balancemigratorio17/
[2Voir par exemple le rapport de l’association Harraga Melilla « De niños en peligro a niños peligrosos », 2016
[3Voir les travaux de l’AMDH Nador sur les violations des droits humains dans la région
[4Cette pratique de refoulement expresse des personnes vers le Maroc opérée par les autorités espagnoles a déjà été condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme, voir : CEDH, 3 octobre 2017, N.D. et N.T. c. Espagne, req. n° 8675/15 et 8697/15
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06 avril 2018

Euronomade : APPEAL: CRIMINALISATION OF SOLIDARITY, RIGHT TO ESCAPE, SOLIDARITY CITIES

CRIMES OF SOLIDARITY: SUCH AN EXPRESSION APPEARS AS A CONTRADICTION IN TERMS, A REAL OXYMORON. NEVERTHELESS, IT CONVEYS VERY WELL THE MEANING AT THE HEART OF A TWO-FOLD CONFLICT, WHICH SEES, ON THE ONE HAND, THE CRIMINALISATION OF EUROPEAN CITIZENS WHO ARE MOBILISING IN SUPPORT OF MIGRANTS IN TRANSIT AND, ON THE OTHER, THE STRENGTHENING OF SOLIDARITY PRACTICES AND NETWORKS IN BORDER AREAS AND IN MANY URBAN CENTRES.

WHILE WE ARE WITNESSING ASYLUM SEEKERS BEING PREVENTATIVELY ILLEGALISED IN EUROPE AND CONTAINMENT POLICIES MULTIPLYING ON THE SOUTHERN AND EASTERN SHORES OF THE MEDITERRANEAN, THE AUTONOMOUS INFRASTRUCTURES CREATED TO SUPPORT MIGRANTS IN TRANSIT ARE NOT ONLY CAPABLE OF GIVING RISE TO A LOGISTICS OF RESISTANCE AGAINST THE SECURITY POLICIES OF BORDER CONTROLS, BUT ARE ALSO ABLE TO PRODUCE MORE OR LESS TEMPORARY OR PERMANENT FRACTURES IN THE MILITARISED SPACE OF “FORTRESS EUROPE”.


In a context marked by unprecedented criminalisation of solidarity practices, we are witnessing a disturbing escalation of institutional and street racism. The arbitrary interventions of police forces and border patrols are more and more frequent and acting in the name of the joint fight against terrorism and “irregular” migration. Last in time, but first for the intensity of the diplomatic shock it produced, is the story of the armed raid carried out by five French Customs agents within the premises of the railway station of Bardonecchia, in order to perform a urine test on a Nigerian boy who had legally travelled from Paris to Naples. In this instance, the Nigerian citizen was detained and subject to anti-drug control under the pressure of French armed officers who effected it exclusively on the basis of racial profiling, a practice unofficially regulating control practices on the trains crossing national borders. What happened in Bardonecchia is an attack that must be understood and framed as part of a series of acts of intimidation carried out by police forces, against citizens mobilising in support of migrants blocked or rejected at the borders.

Since March 24, migrants and activists have occupied a room inside the church of Claviere, a few kilometres from Bardonecchia on the Italian-French border. “The problem is not the snow, it’s not the mountains; the problem is the border”, they declare. The occupants are protesting against the emergency register. They repeat over and over that it is not the bad weather conditions, which is causing fatal deaths. It is the very existence of the border and its currently functioning system. In this context, building solidarity networks means rejecting the vocabulary related to the idea of migrants’ “management”. The action must focus instead on the opening of common spaces of struggle and permanence – say the occupants of Claviere.

From Catania to Calais and from Melilla to Edirne, our hopes are nurtured by a diverse and wide movement of solidarity with migrants, which includes Catholic groups, individual citizens, NoBorder militants and Guides sans Frontieres, the alpine guides in the French Alps. The heterogeneity of experiences and practices of solidarity represents the true richness of the movement in support of migrants. This movement is animated by organised groups as well as by citizens who autonomously decide to mobilise in order to react to the criminalisation of solidarity. Among the latter, the case that more than any other attracted public attention is that of Cedric Herrou, a French farmer from Val Roia who in 2016 was accused of having helped migrants to cross into France from Italy and of hosting them. It was then the turn of the French researcher Pierre-Alain Mannoni, accused of rescuing three Eritrean women.

According to the “Code of Entry and Stay of Foreigners and Right to Asylum” (CESEDA), those accused of having “facilitated or attempted to facilitate the entry, circulation or irregular stay of a foreigner” are punishable by the French authorities with fines amounting to 30,000 Euros, as well as up to two years in prison. Along with Mannoni and Herrou, dozens of citizens have been (or are still) on trial for providing food and hospitality to migrants. These accusations rely on national laws that refer to the European Directive of 2002 related to “Favouring illegal entry, transit and stay”. In some places, such as Calais, the emergence of autonomous infrastructures of solidarity and material support to migrants has brought to light contrasts, hitherto not apparent, between the different institutional levels: local administrations against the judiciary, national government against the power of attorneys.

The “fight over the showers”, that is to say the dispute initiated by spontaneous groups and local associations for the provision of hygiene services to migrants passing through Calais, has become a true icon of the solidarity movement with migrants trying to cross the Italian-French border. The European policy on the criminalisation of solidarity and the suspension of rights in the areas of humanitarian emergency is therefore answered by the multiplication of spontaneous and organised initiatives of active solidarity (both individual and collective).


European Union, Turkey and repression of the right to escape

The institutionalisation of the criminalisation of solidarity practices is not limited to the space within the borders of the European Union. In Turkey, the case of two European citizens has made jurisprudence. In September 2015, they were near Edirne together with other volunteers and non-governmental organisations to demonstrate solidarity and provide logistical support to Syrian, Afghan and Iraqi refugees who organised themselves to cross the border with Greece claiming the right to use safe and legal channels to reach Europe rather than embarking on life-threatening journeys. By violating the principles of freedom and security guaranteed by the European Convention for the Protection of Fundamental Rights and Freedoms, the Turkish authorities did not provide any official explanation to justify the arrest warrant and the expulsion. To make matters worse, the two activists have been lynched by pro-government media, which published pictures linking the events to their participation in the 2013 Gezi Park uprising in order to accuse them of international espionage.

In the “new Turkey” of Erdoğan, every form of political dissent – and solidarity with dissidents – is now legally defined and widely accepted as support to terrorism. The management of migratory flows is an integral part of the political consensus building process of an authoritarian state that continues to largely exploit the strong feeling of national belonging to expand regional power. So far, Europe’s reaction to the abolition of the rule of law and violations of human rights has been limited to bland reprimands, which confirm Europe’s reactionary order. The mildness of the reactions certainly depends on the Union and some member States’ economic interests in the war industry, infrastructure and energy sectors, but also on the threat of reopening the border with Greece.

The outsourcing of the European borders is partly already completed through the ratification of collaboration agreements that effectively repress the right to escape. On the one hand, the Karthoum process aims at co-opting African countries in the migration control policy; on the other hand, the EU-Turkey deal endorses the premise that Turkey is “a safe country” and shows the partial effectiveness of the rejection strategy. According to the geographical limitations of the 1951 Refugee Convention, Turkey does not guarantee the recognition of refugee status – and therefore the right to asylum – to any citizen who is not European. Asylum seekers wait for years to be resettled in third countries, while Syrians can at most benefit from a temporary protection regime which allows them to live in Turkey as “guests”, but which does not guarantee the full protection provided by the convention.

However, refoulement does not take place only from Greece to Turkey but, even worse, from Turkey to Syria. Human Rights Watch provided reports on the violation of international human rights standards in the border area from 2015 onwards (year of the official closure of the border). Besides killings and injuries, other systematic abuses include detention, beatings and refusal of medical assistance. The complicity of the European Union is proven by the news of a loan amounting to more than 80 million euro in addition to the 6 billion agreed with the deal, which has been used for the purchase of military equipment to patrol the border and the wall sealing part of the border with Syria.

The politicisation of the humanitarian

The criminalisation of autonomous infrastructures in support of migrants’ transit and stay as well as of other practices of active solidarity highlights a “politicisation of humanitarianism” that offers spaces of intervention that movements and transnational solidarity forces cannot waste to achieve a radical transformation of the existing order. Obviously, it is not a question of re-proposing the simplification of an indistinct humanitarian sphere as opposed to state authorities, given that the axes of collaboration between state and security intervention on the one hand and humanitarian measures on the other have never ceased to strengthen each other. Rather, what the ongoing criminalisation of active solidarity practices demonstrates is precisely the internal differentiation marking the universe of experiences that are commonly labelled as “humanitarian”. Not surprisingly, the public discourse is constantly built upon the alternate use of the terms “solidarity” and “humanitarianism”. It is not the intervention as such that is the object of the repressive measures, but the ways in which the reception and the relief are provided, that is to say the transversal alliances – between migrants and non – who leave the official circuits of migration management.
The recent seizure of the humanitarian vessel of Proactiva Open Arms brings to light the contradictions of the emergency policy adopted in defense of the “Fortress Europe”. Created by volunteers in a self-organised way in 2015, the Spanish non-governmental organisation belongs to the minority of humanitarian organisations that have joined the so-called “code of conduct” for the rescue of migrants. The code is a measure that the Minister Minniti adopted in 2017 in response to the pressure exercised by populist and nationalist forces such as the Five Star Movement and the League in Italy with the purpose of further tightening border control. However, adhering to the ‘code of conduct’ did not allow Proactiva Open Arms to escape the repression of Italian judicial authorities. Conversely, it has been used by the Catania Public Prosecutor to justify the criminalisation of the NGO’s activity.

Solidarity ecosystems: for a network of solidarity cities

The case of Proactiva Open Arms demonstrates how disobedience to the policies of criminalisation of solidarity is not an option. Rather, it currently constitutes a choice that is de facto the only forced option available to movements and various forces that support migrants in reclaiming their right to escape and to autonomously cross borders. The strengthening of cooperation within the migrant solidarity movement is crucial in order for such disobedience not to remain isolated but to acquire political value. Following the seizure of the Proactiva Open Arms ship, the mayor of Barcelona, Ada Colau, drew attention to the role that local administrations can play within the migrant solidarity movement. They can in fact promote networks to provide solidarity, to protest against the militarisation of borders, and to oppose the politics of fear and hatred that is dominating the European public sphere.
As spaces for shelter, cities and metropolises represent real outposts, hubs and widespread nodes of the movements that resist this politics of repression. Today, cities and metropolises constitute in fact spaces where we can already observe a multitude of mobilisation initiatives in defence of human rights, democracy and common goods, although they are mostly invisible or dispersed. The vitality and institutional diversity of cities and metropolises are the living proof of their constituent potential: not only mayors and administrations standing up to austerity measures but also neighbourhood councils, and above all a widespread network of supportive associations, movements, spontaneous groups and individual citizens. The richness and the variety of these “solidarity ecosystems” makes an essential contribution to the movement involved in welcoming and providing logistical support to migrants and refugees.
On a practical level, cities and metropolises are already playing a central role within the migrant solidarity movement for the right to freedom of movement in the European and Mediterranean space. However, their role can become even more crucial on the political level. In fact, we believe that the political and institutional potential of the “solidarity cities” is not yet valued enough with regard to the possibilities it actually entails. A more incisive and conscious effort to enhance the institutional potential of the “solidarity cities” would be in fact able to generate new constituent spaces of post-national democracy by calling into question the sovereignist position that currently dominates the national borders defense and fortification policies implemented by the European Union and its allied countries. It is only starting from the cities and the metropolises – but also from border territories like the Val di Susa – that it is possible to challenge the criminalisation of solidarity and, at the same time, to initiate a broader constituent process capable of redefining the idea and the very experience of Europe and globalisation.
(mailto: appelloeuronomade@gmail.com)

Collettivo Euronomade, Ugo Rossi, Carla Stoppani, Martina Tazzioli, Yasmine Accardo, Giuseppe Acconcia, Mirko Alagna, Giuseppe Allegri, Giso Amendola, Marco Assennato, Gennaro Avallone, Marco Bascetta, Moira Bernardoni, Emanuele Braga, Corrado Borsa, Beppe Caccia, Vincenzo Carbone, Sandro Chignola, Roberto Ciccarelli, Alice Dal Gobbo, Nicholas De Genova, Girolamo De Michele, Alisa Del Re, Roberto Demontis, Graziella Durante, Luigi De Magistris, Nino Fabrizio, Ludovica Fales, Giovanna Ferrara, Omid Firouzi Tabar, Glenda Garelli, Dario Gentili, Federica Giardini, Chiara Giorgi, Gaetano Grasso, Alessandro Guerra, Peter Hallward, Michael Hardt, Augusto Illuminati, Orazio Irrera, Marcello Lorrai, Maria Rosaria Marella, Costanza Margiotta, Lauren Martin, Nicolas Martino, Ugo Mattei, Miguel Mellino, Sandro Mezzadra, Cristina Morini, Paolo Napoli, Yoan Molinero Gerbeau, Toni Negri, Franco Oriolo, Vincenzo Ostuni, Oana Parvan, Maia Pedullà,  Francesco Pezzulli, Livio Pepino, Lorenzo Pezzani, Fiorenza Picozza, Simone Pieranni, Giacomo Pisani, Roberta Pompili, Gabriele Proglio, Judith Revel, Alessandra Sciurba, Michele Spanò, Federico Tomasello, Alberto Toscano, Giulia Valpione, Benedetto Vecchi, Simone Veglio, Carlo Vercellese.



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02 avril 2018

L’Europe délocalise le tri des migrants

Refoulés d’Algérie, rescapés de l’enfer libyen… Les organisations internationales décident de leur sort au Niger. Très loin de la Méditerranée.



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30 mars 2018


Aujourd’hui comme hier, les espoirs de nombreuses personnes exilées se fracassent sur la réalité des camps fermés des États européens qui, d’une part, érigent les droits de l’homme en étendard et, d’autre part, exigent des exilés qu’ils restent hors de l’Union européenne (UE). Au prétexte d’arrivées « massives », l’UE et ses Etats voisins n’ont cessé de renforcer leurs systèmes d’enfermement : de 2011 à 2016, la capacité totale connue des camps recensés par le réseau de migeurope est passée de 32 000 à 47 000 places.



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SUR LES RIVES DU DESERT DE L'ALGERIE

Le mois de Mars a témoigné plusieurs centaines de migrants refoulés
d’Algérie. En dépit de la fermeture des frontières Algéro-malienne  et
malgré les cris de détresse, les plaintes et les alertes formulés
auprès des organismes internationaux (Amnistie Internationale…);
l’Algérie perpétue sans cesse les arrestations et les refoulements de
migrants dans ces zones dépourvues de toute assistance humanitaire et
contrôlées par des Djihadistes et des groupuscules armés.
Les droits des migrants sont bafoués continuellement : pas de
notification de l’ordre de quitter le territoire, pas de contrôle du
juge de la légalité, de l’arrestation, de la privation de liberté et
de la reconduite à la frontière, abandon en plein désert d’adultes
sans tenir compte des personnes vulnérables mais surtout pas de
contact direct des migrants avec leurs représentants consulaires.
Ce phénomène de refoulement massif est ressenti à notre niveau depuis
que le Niger a refusé d’accueillir les migrants non nigériens dans son
terroir. Va savoir combien de maliens refoulés ont transité par le
Niger bien avant.
Grâce aux témoignages de certains migrants accueillis au centre le 13
Mars dernier, on a appris que plus de 250 personnes étaient bloquées à
In-Khalil. Cependant, une tentative d’acheminement de retours
volontaires  avait été tentée récemment. Ceux dont le chauffeur engagé
a trouvé sur place, à l’image de leurs prédécesseurs, préféraient
rebrousser chemin  dans l’optique de récupérer leurs biens abandonnés
à cause d’une arrestation précipitée et abusive après trois ou quatre
ans de vie.
En moins de quarante-huit (48) heures, la Maison du Migrant a
accueilli des vagues successives de migrants en provenance d’Algérie,
dont Soixante migrants, cinq mineurs et en majorité maliens. En dépit
de la fatigue, certains souffrent de carence tandis que d’autres sont
administrés à l’hôpital pour Paludisme aigu et crise d’ulcère.
Cette situation criarde a interpellé sans doute les autorités
maliennes car nous avons été surpris de recevoir, pour une première,
la visite du Responsable de  la Sécurité d’Etat et  la Garde Nationale
à Gao venir récolter des données sur la statistique du nombre de
migrants accueillis, de leur nationalité et de leur lieu de
provenance.
Face à tout cela, nous ne pouvons-nous empêcher de spéculer sur
certaines inquiétudes à savoir :
1.      Quelles approches diplomatiques ont été à la base prises par les
autorités consulaires pour défendre les droits de leurs ressortissants
en Algérie ?
2.      Les échanges ressortis lors de la visite dernière du Ministre de
l’Intérieur Français, Mr Collomb au Niger, ne nous poussent-il pas à
croire que nos autorités minimisent les politiques migratoires
européennes ?

Ainsi, la Maison du migrant prévoit le plutôt possible de faire une
déclaration auprès des radios locales le vendredi 31 Mars prochain et
une succession de rencontres d’échanges en vue d’interpeller les
autorités étatiques sur le contexte d’expulsion des migrants dans
cette no-man’s land.
On ne saurait finir sans souligner la libération des neufs passeurs
interpellés par la sécurité d’Etat à Bamako, en début février passé.
L’Etat malien avait décidé de réagir contre les réseaux de passeurs
incrédules qui profitaient de la vulnérabilité et de la naïveté des
migrants, candidats au départ. Cette mise en disposition quoique
salutaire ne nous éloigne pas de  notre motivation première qui n’est
autre que de défendre les intérêts et les droits des migrants.
Salutations amicales
Eric
Maison du Migrant Gao

Voir : migreurop
Et
ccfd-terre-solidaire

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27 mars 2018

Un cadeau de l’Italie à la Lybie

Voir d'ara.cat en catalan

"Le patrouilleur 648 qui a menacé Open Arms, un cadeau de l’Italie à la Lybie.
L’UE a entrainé l’équipage du bateau qui a joué un rôle dans plusieurs incidents avec des ONG de sauvatage.
CRISTINA MAS Barcelona 25/03/2018 00:21
Le bateau de patrouille des gardes-côtes libyens qui a menacé dans les eaux internationales les volontaires d’Open Arms le 15 mars afin qu’ils leur livrent les femmes et les enfants qu’ils étaient en train de secourir, était un cadeau de l’Italie à la Libye. La même embarcation, qui porte le numéro d’identification 648 et le nom de Ras al Jadar, a joué un rôle dans plusieurs autres incidents avec d’autres bateaux des ONG SeaWatch et SOS méditerranée, qui travaillent au sauvetage de naufragés en Méditerranée.
Entre 2009 et 2010, le Premier ministre italien Silvio Berlusconi a alors accordé six patrouilles aux garde-côtes libyens dans le cadre de l'accord amical signé avec le dictateur libyen Mouammar Kadhafi. Le texte prévoyait la construction d'un système de radar dans le but de surveiller les frontières du désert et des patrouilles maritimes conjointes dans les eaux libyennes et internationales pour empêcher que des bateaux quittant la Libye arrivent en Italie.
Mais la vie des six bateaux de patrouille donnés à Kadhafi – toutes du modèle Bigliani, qui étaient auparavant au service du corps militaire Guardia di Finanza - était aussi courte que la période à laquelle le dictateur a survécu au pouvoir. Le 17 février 2011, le printemps arabe atteint la Libye avec une révolte qui a déclenché une intervention de l'OTAN et s'est terminée avec la mort de Kadhafi huit mois plus tard. Deux des embarcations ont été détruites dans les combats, et les quatre autres, dont le 648, ont été réparés à l'usine navale de Fiamme Gialle de Miseno (Naples). En avril dernier, l'Italie les a rendue au gouvernement de Tripoli.
L'incident du 15 mars avec Open Arms n'est pas le premier d'une ONG avec ce bateau de patrouille. Le 6 novembre, l’ONG allemande Sea Watch, travaillant dans la même région, a rapporté qu'à 30 miles de la côte libyenne la même patrouille a interféré dans un sauvetage.
Les migrants à bord ont pris panique, le bateau des gardes-côtes les a rattrapé, certains naufragés ont pu grimper sur le bateau de patrouille sans que les agents ne les aident et, une fois à bord, comme on peut le voir sur la vidéo enregistrée par l'ONG, les gardes-côtes les ont frappés avec les amarres du bateau.
Un jeune a tenté de descendre pour atteindre le bateau de l'ONG et est resté suspendu à l’échelle, au moment où le bateau libyen a accéléré et mis sa vie en danger. Au moins cinq migrants sont morts dans l'opération, des décès qui selon Sea Watch auraient pu être évités.
Le 4 mars, le navire Aquarius, de l'ONG SOS Mediterranée, a également subi l'hostilité de la patrouille 648, qui s'est approchée d'eux au cours d'une collision sans répondre à leurs avertissements radio et finalement ils leur ont ordonné de quitter le site, à 17 milles au large de la côte, alors même s'ils étaient à la recherche d’un bateau.
Un autre vaisseau d'Open Arms a eu, en août, un incident avec un autre bateau de patrouille donné par l'Italie, le 654, qui les a menacé avec deux rafales de balles tirée en l'air et une semaine plus tard les a forcés à naviguer pendant environ deux heures en direction de Tripoli en disant qu'ils étaient sous sa protection.
Rome et l'ensemble de l'UE ont choisi l'un des trois gouvernements qui se disputet le pouvoir dans la guerre civile en Libye, celui dirigé par le Premier ministre Faiez al-Sarraj, qui a le soutien de l'UE et de l'ONU, mais ne contrôle seulement qu'un tiers du pays. La Libye est plongée dans un conflit sans front avec des centaines de milices armées.
Le Premier ministre italien Paolo Gentiloni et Al-Sarraj ont signé le 2 février 2017 un protocole d'accord - dans le cadre de l'accord signé par Berlusconi et Kadhafi - qui établit une coopération bilatérale dans les domaines du développement, l'immigration illegale, le trafic d’êtres humains, la contrebande et le renforcement de la surveillance des frontières entre l'Italie et la Libye. L'Italie livrera à Tripoli six patrouilles supplémentaires totalement neuves.
L'Espagne s’est proposé de former 100 garde-côtes libyens dans la base navale de Carthagène. Dans le cadre de l'opération Sophia de l'OTAN, le programme de formation de la Garde côtière libyenne financé par l'UE avec 46 millions d'euros a déjà formé 93 agents dans un navire italien et dans un autre navire néerlandais. 43 officiers supplémentaires ont été formés en Crète, à Malte et à Rome.
Human Rights Watch lance un cri d’alarme: "Aider les autorités libyennes à capturer des immigrés en haute mer, sachant qu'ils les rendront à un traitement cruel, inhumain ou dégradant dans une détention arbitraire, expose l'Italie et d'autres pays de l'UE à participer  à une violation grave des droits de l'homme ". Les accusations ne viennent pas seulement des ONG. Le groupe d'experts de l'ONU sur la Libye a rappelé que "les abus contre les migrants ont été largement collectés, y compris les exécutions, la torture ou la privation de nourriture, d'eau et de médicaments", et prévient que "le département contre l'immigration (libyen) et la garde côtière (italienne) sont directement impliqués dans ces graves violations des droits de l'homme. " Avec les accords d'externalisation du contrôle des frontières de l'UE, le témoignage des ONG en Méditerranée centrale devient de plus en plus gênant."